2 Décembre 2008
Après l'avoir examinée "avec beaucoup de sincérité", M. Leonetti a finalement écarté cette hypothèse, estimant qu'un comité d'experts, s'il était appelé à se prononcer sur les demandes d'euthanasie présentées par des patients, "n'aurait pas de légitimité à se placer au-dessus des lois". M. Leonetti a également rejeté l'idée de créer une circonstance atténuante spécifique en cas de crime commis par compassion : il considère que les juges, s'ils sont mieux informés sur le contenu de la loi, sont "d'ores et déjà en mesure d'utiliser les ressources de la procédure pénale pour absoudre ou juger avec mansuétude".
Pour M. Leonetti, le droit de mourir, qu'il s'agisse du suicide assisté (fourniture d'un produit létal) ou de l'euthanasie (geste actif commis sur un patient) ne peut être considéré comme "un droit créance", qui obligerait la société à l'égard d'un individu.
Plutôt que d'accorder un droit à mourir, et d'autoriser ainsi des dérives sans fin, M. Leonetti souhaite combattre la méconnaissance de la loi sur la fin de vie. Il propose également de préciser, dans le code de déontologie médicale, que les médecins ont l'obligation d'accompagner, par une sédation terminale, les patients dont on arrête les traitements actifs et qui sont inconscients. Il recommande aussi l'instauration d'un médecin référent en soins palliatifs dans chaque département pour aider la communication entre famille et médécins, dénouer des situations complexes. Le rapport propose également la création d'un Observatoire des pratiques médicales de la fin de vie : aujourd'hui, une seule étude a été réalisée sur la mort à l'hôpital montrant qu'un quart des patients seulement décédaient entourés de leurs proches.
Enfin, la mission préconise l'expérimentation d'un congé d'accompagnement d'un proche en fin de vie, à domicile, et qui pourrait être rémunéré par l'assurance-maladie. Les députés estiment que le coût d'une telle mesure pourrait être compensé par les économies réalisées par un nombre moindre d'hospitalisations. Il permettrait d'éviter la pratique, courante, des faux arrêts maladie accordés par des médecins aux proches d'un mourant (v. Le Monde.fr, ICI).
"Vous avez visité un certain nombre de pays où l'euthanasie est acceptée. Quelle impression cela vous a-t-il fait ?
Nous avons en effet visité les Pays-Bas et la Belgique, qui ont dépénalisé l'euthanasie, et la Suisse, où le suicide assisté est autorisé. Nous nous sommes également rendus en Angleterre, où malgré une culture différente, la législation est proche de la nôtre. On constate d'abord que les critères retenus pour obtenir un droit à la mort sont flous, se référant souvent aux termes de «détresse insoutenable», et difficilement respectés dès lorsqu'ils sont précis. Des malades psychiatriques sont euthanasiés en Belgique, alors que ces patients doivent théoriquement être écartés du dispositif. En Suisse, un tiers des personnes qui choisissent l'aide au suicide n'ont pas de maladie grave et incurable.
Enfin, là où les sons palliatifs ont été développés, comme récemment en Hollande, l'euthanasie régresse, car cette prise en charge diminue considérablement la demande de mort. En Suisse, l'hôpital de Lausanne, qui a pourtant ouvert ses portes aux associations proposant le suicide assisté, n'a eu qu'une demande en un an et demi. Tous les pays s'interrogent et aucun système n'est dépourvu d'inconvénients ni à l'abri de dérives. Il n'y a donc pas de pays en avance sur les autres. L'Angleterre, qui a une longue tradition de soins palliatifs et un nombre de bénévoles très important, peut être considérée sous cet aspect comme un modèle."