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14 juillet 2008 : drapeau en berne




Pour la première fois depuis longtemps, nous n'avons pas assisté au défilé du 14 juillet à Paris. Il nous était insupportable de voir l'armée française rendre les honneurs à un Président syrien.

Il nous paraît raisonnable que la France déploie ses efforts pour que la Syrie sorte du rang des "Etats-voyous", pour jouer son rôle dans le monde méditerranéen comme au Proche-Orient. Il est plus intelligent de jouer ce jeu-là, pour le profit de tous, que de marginaliser ce pays et de le détruire comme il a été fait pour l'Irak, d'autant que sa fragilité virtuelle l'expose à devenir à terme un axe de la politique hégémonique de l'Iran.

Mais pourquoi a-t-il fallu que M. SARKOZY aille jusqu'à cette inutilité déshonnorante d'inviter à présider le défilé de nos troupes, un 14 juillet,
le Président d'une République qui évoque pour nous tant de sang et qui, il y a peu encore, travaillait à déstabiliser le Liban, y compris par l'assassinat ?

A-t-on déjà oublié la mémoire de Louis DELAMARE, ami personnel de Bechir GEMAYEL, assassiné par les services syriens, en 1981, à quelques pas de l'ambassade de France ? Il est très à la mode de faire repentance. Celle du Président syrien serait la bienvenue. Voici le rappel fait par son neveu de ces événements :

« L’ambassadeur Louis DELAMARE avait joué un rôle prépondérant de médiation lors de l’encerclement de la ville libanaise de Zahlé, en parvenant à faire respecter un cessez-le-feu de 48 heures et en permettant aux Chrétiens de la ville martyr d’évacuer les civils et les blessés avant le massacre final sauvagement et méthodiquement orchestré par l’armée de Damas.

Outre les Syriens et leur satrape vexés d’avoir été humiliés par le représentant d’un “petit pays” comme la France, d’autres puissances régionales ou plus lointaines -dont certaines occidentales- ne virent pas d’un mauvais œil l’influence de Paris réduite au corps criblé de balles de son ambassadeur dans son véhicule diplomatique. Et les protestations des chancelleries contre cet assassinat furent bien légères à l’époque. » (2)

A-t-on oublié les enlèvements, les assassinats, les tortures sans nombre auxquels se sont livrés ces mêmes services syriens, par industrie d’Etat, contre nos ressortissants et nos amis libanais, des amis personnels, et des amis de notre pays, journalistes, hommes d’Etat, hommes de dévouement et de courage, depuis tant et tant d’années, en complicité active avec les terroristes du Hezbollah ?

Quand le Journal du Dimanche a récemment posé la question à M. Amine GEMAYEL, ancien Président de la République libanaise, dont la famille a été particulièrement éprouvée par la tyrannie sanglante de la Syrie, ce qu'il pensait de cette invitation de M. Bachar Al-Assad à présider le 14 juillet, il a répondu laconiquement ceci : « Il vaudrait mieux poser cette question aux parents de l'ambassadeur Delamare ». Cette phrase est lourde de sens (3).

A-t-on oublié aussi les 58 parachutistes français des 1er et 9e RCP, “soldats de la paix” sur mandat de l’O.N.U., qui ont été assassinés dans l’immeuble du “Drakkar”, à
Ramlet El Baida, le 23 octobre 1983 (1) ? Ils avaient alors à peine 20 ans pour la plupart. Leurs parents, leurs camarades, leurs amis sont toujours là pour les pleurer. Il n’y a pas de commémoraison pour ces souffrances-là. Il n’y avait jusqu’à aujourd’hui que l’oubli, et le vent desséchant de l’ingratitude, si habituels à de tels sacrifices. Il y a désormais la honte douloureuse.

Le gouvernement français s'emploie aujourd'hui, par un communiqué de l'Elysée, à blanchir la Syrie de cet événement, par une défense peu convainquante, car l'Iran ici incriminé marche depuis longtemps de concert au Liban avec la Syrie, et il paraît pour le moins difficile de croire - à supposer que son rôle ne fut pas direct - que les services syriens n'aient rien connu des préparations de cet attentat.


Nous sommes consternés. M. Sarkozy est un homme d’ambitions tous azimuts, pour le meilleur et pour le pire. Mais plus le temps passe, et plus il apparaît qu’il ne semble pas percevoir ce que “valeur” veut dire ou, tout du moins, ce que signifie la hiérarchie des valeurs. C’est l’immoralité politique absolue, dans une société qui se targue d’être portée par le respect des droits de l’homme, que de faire rendre publiquement les honneurs à un homme qui ne pourrait prétendre qu’à celui d’être défendu devant le tribunal international dont ses crimes l’ont rendu justiciable.


Oui, tout cela est consternant. Consternant d'immoralité. Notre 14 juillet à nous est de rendre hommage aux victimes de ces barbaries, en particulier par le chant que nous avons mis en tête de cette page : Ceux du Liban, composé en l'honneur des soldats parachutistes morts sur cette terre.

_______________
(1) Au même moment, non loin de là, à l'aéroport de Beyrouth, 241 marines américains subissaient le même sort. Sur cet événement, on ne peut mieux faire que de renvoyer au beau site qui lui est dédié [
ICI].
(2) En effet, la mort de ces hommes n'avait donné lieu qu'à des raids symboliques dans la plaine de la Bekaa. Voir son blog [ICI] en particulier ses deux derniers articles : “Bachar El ASSAD à Paris; le point de vue de Raoul DELAMARE” et “Les assassins se succèdent à l'Elysée”.
(3) Cf.
ICI.

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S
Merci pour cette indignation qui console tous ceux qui ont vécu au liban et qui connaissent la réalité de la mainmise syrienne sur ce pays et le lourd tribut payé par nos compatriotes.
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